Slavko kopac quotes

“A quoi servent les définitions? Quand même, elles ne sont que la moitié de la vérité. Si vous voulez bien, c’est le travail d’un homme qui ne sait pas ce qu’il fait. Pouvez-vous imaginer qu’un homme qui passe toute sa vie dans un établissement pour déficients mentaux peut créer un chef-d’œuvre? Vous vous demandez: Comment ça se fait? C’est un instinct dont même une personne normale n’est pas consciente . Les éléments de la spontanéité et de l’ immédiateté incitent chaque homme à s’exprimer. Quels que soient les moyens  déployés afin de le faire. Dubuffet a fait aussi une collection de textes des fous. C’est un langage  extraordinaire. Avec l’Art Brut, nous voulons affirmer que chacun parmi nous est un peintre, un poète, un musicien potentiel et que chacun peut créer une bonne toile, de bons vers ou de bonnes notes de musique. Il faut simplement trouver le bon moment pour ça et être courageux. Pour moi, l’Art Brut est un espace vital, une excitation perpétuelle. On ne peut pas s’approcher de l’art avec les préjugés pédagogiques: comme des instincts ou des messages le sont. C’est de la pure spontanéité, de l’exubérance, de la folie, si vous voulez.”*

1949, 73 x 92,5 cm; oil on canvas
Promenade 1949

“Le surréalisme ne m’a jamais captivé. Moi et Breton avions des points communs, mais aussi beaucoup de différences. Je ne pouvais pas m’adapter à l’évangile    surréaliste de Breton”.*

“Normalement, je n’aime pas le mot – professionnellement – la profession est quelque chose qui vous déforme. Le peintre qui est un professionnel, il est, je crois, un homme perdu. La peinture est la respiration. Vous travaillez parce que vous le devez, parce que ça vous rend heureux et, quant à l’accouchement douloureux, je ne le connais pas ”.**

1961, 60 x 80 cm; mixed media on canvas
Papillon 1961

“Et je vous dis, c’était une merveilleuse école et j’y pense même aujourd’hui et j’envie mes amis qui ont eu cette chance parce que, aux autres écoles, le traitement était complétement différent. Là, votre professeur serait un professeur qui vous apprendrait comment tenir votre pinceau, il vous apprendrait comment regarder et il cherchait à être enseignant. Et, quant à moi, je pense qu’il n’y a pas de place pour ce type d’enseignement. Je crois qu’un homme, c’est enfin toute cette théorie de l’Art Brut – moins il en sait, moins habile il en est, il serait plus sincère et honnête et soi-même. On peut tout apprendre. L’école, comme toutes écoles, vous entraine jusqu’à un certain point pour être un bon technicien, pour apprendre comment il faut travailler, comment mélanger les couleurs, comment il faut étaler la couleur et tout ça, mais cela ne suffit pas. Je crois que c’est mauvais ”. ***

1961, 81 x 100 cm;mixed media (oil painting, lead, pebbles, impasto)
Terre Noire 1961

“(Dubuffet) Parce qu’il était l’homme qui, à l’époque, était chef de la révolution, c’était lui qui a appliqué toutes ces idées, toutes ces idées anti-académiques, que la peinture ne doit pas être engagée et qu’elle ne doit pas être le résultat de certaines connaissances et réflexions lourdes. Grace à cette notre première quête de la vérité, cette collection de l’Art Brut est née, vous savez ce qui est l’Art Brut bien que vous l’appelez l’art laid, l’art sauvage. C’est un essai pour trouver des choses faites par ceux qui sont loin de tout centre culturel, qui ne savent pas ce qu’un musée est, qui ne savent pas ce qu’une exposition est et qui le font toujours de sa propre volonté et besoin. Il arrive parfois que ça dure une vie entière, de temps en temps ça dure 6 mois, mais ce sont toujours des choses si fraîches, si profondes et si parfaites artistiquement qu’on doit bien s’avouer et se dire que, seulement comme ça, l’homme peut être libre, sans attaches et éloigné de tout ce que notre civilisation nous offre avec toutes ces possibilités, où, chaque jour ils nous préparent et nous imposent des conditions comment passer notre journée. C’est le seul sain et le seul important et je crois, le seul qui a le droit d’être nommé l’art. Pour tous ces autres, je n’utiliserais pas ce terme ”. ***

Personnage à grosse tête, vers 1961

“Je ne dis jamais ou je dis rarement que je suis peintre parce que je crois que ça ne signifie rien. Et quand je le dis, je dis que je peins de temps en temps, mais, en soi-même, c’est complètement mal positionné. Car un peintre est un homme qui a fini l’Académie des Beaux-Arts, en sorti avec un diplôme, c’est un homme qui a été adapté, auquel ils ont commencé à construire une petite auréole et il a cette auréole dans la rue, il la porte chez lui et partout où il se trouve. L’auréole est déjà présente et, toute la vie tourne autour de la faire briller le plus possible, de la faire plus riche, qu’elle éblouit tout le monde. En même temps, ça signifie un revenu garanti. C’est ça qui me tracasse, pour peindre, on doit avoir et créer autour de soi un cercle de gens qui le feront et qui, éventuellement, réussiront à vous rendre la vie plus facile, vous permettre de trouver ce bifteck à vous plus facilement, de le payer plus facilement et de le ramener à la maison. Et c’est pourquoi je pense que, dans ce sens-là, un artiste se trompe, c’est-à-dire, il ne se trompe pas, mais ils se met dans un état de dépendance. Il doit trouver ce cercle de gens, il doit fasciner ces gens avec ce qu’il fait ou bien permettre que ces gens le fascinent avec ses désirs et c’est là où il devient un instrument, il fait ce que celui qui est devant lui demande. Donc, dans ce sens-là, je crois qu’un artiste a perdu la première trace de sa liberté et puis, cette auréole et cette course après l’auréole, c’est ce que, dans la nature humaine que, finalement, ce ne sont pas seulement le pain et le vin ou le pain et le lait qui sont importants, c’est aussi un grand appartement, c’est le papier peint qui est important, la lumière du nord est importante. Donc, ces désirs et ces compromis augmentent de jour en jour et, à la fin, l’homme se perd et devient moins soi-même. On dirait, il devient, s’il a un peu de chance et d’intelligence, ce qu’autrefois était un peintre, c’est-à-dire, il est le document de son temps, il n’a plus rien d’autre à dire; il copie ce qu’il voit et il nous le sert ”.***

1947, 61 x 81 cm; oil on canvas
Chevaux, 1949

“Il devrait le souhaiter plus qu’il le fait. Certains peintres au Moyen Age et à la Renaissance avaient ses peintres qui finissaient ses œuvres et qui réparaient les peintures sur le carton. Ce sont ces techniciens et ils étaient d’excellents peintres, probablement beaucoup plus doués que nous qui sortons des académies aujourd’hui. Kodak d’aujourd’hui est celui qui dépeindra, enregistrera, pour ce qui suit. Aujourd’hui, il a tout noté, enregistré, ce moment n’a plus de sens. Un peintre aujourd’hui ne doit pas et il ne faut plus qu’il soit le peintre de cette réalité. Qu’il change de voie, devient quelque chose d’autre, qu’il chante, qu’il fasse le fou, que ça soit l’écho de son être ”.***

1949, 65 x 92 cm; oil on canvas
Le Vainqueur, 1949

“C’est vrai, Picasso a dit le premier: “Ouvre les fenêtres!”. J’ajoute que ça ne suffit pas. Ouvre les fenêtres et les portes et il ne faut pas pas seulement les ouvrir, mais aussi casser les vitres parce que les fenêtres et les portes peuvent être fermées, c’est pourquoi il faut les casser ”.***

“Quand j’ai commencé, on avait à peu près 200 ou 300 documents et après 35 ans, on avait environ 5 mille dans la grande collection et le même nombre dans la collection où ces (….) de l’Art Brut sont gardé(e)s depuis qu’il existe et depuis les expositions existent, depuis qu’on écrit et depuis que nous publions nos périodiques, qui continuent d’être publiés maintenant en Suisse. Le monde a commencé à se familiariser avec ce que c’est et tout ce qui est aujourd’hui un peu en dehors des normes, tout ce qui semble avoir l’odeur de quelque chose qui est révolutionnaire, reçoit cette appellation de l’Art Brut. Donc, en fait, il existe, grâce aux critiques et aux gens qui écrivent, le danger que l’école de l’Art Brut soit créé parce qu’on a constaté, je crois que c’est la manière dont on trouve la solution pour ce moment malheureux, quand on ne sait plus où l’on va, quand on, sans tête et follement, cherche des voies nouvelles ”.***

*Mirko Galić; Deuxième lecture – Causeries, Matica Hrvatska, Zagreb 2007

**Antun Babić – La vie et l’oeuvre de Slavko Kopac, imprimée par Zebra, Vinkovci, 2005

***Entretien du 8 août 1984 pour l’émission de radio Meetings and Connaissances

“Pendant mon séjour à Paris, j’ai vu l’arrivée des Allemands, dans la rue Saint-Jacques, où Guy Papa avait son magasin. Pouvez-vous juste imaginer l’âme d’un peintre devant ces bandes terrifiantes de soldats allemands. On peut être affecté par la guerre de nombreuses façons; dans mon cas, il me semble qu’elle a renforcé ma maturité, approfondi ma sensibilité ”.*

Sans titre, 1945/46

“Je crois que cela faisait même pas huit jours que j’étais à Paris quand Dubuffet m’a vu. On a parlé pendant longtemps; en effet, c’était lui qui parlait et moi qui écoutais. Et il m’a dit: – J’aimerais voir ce que vous faites. Montrez-moi vos œuvres un jour. Moins d’une semaine après notre rencontre, je suis allé à notre prochain rendez-vous avec quelques travaux. Il m’a regardé avec attention et dit: – Après le dîner, accompagnez-moi à mon atelier pour voir par vous-même que ce que vous faisiez en Italie, je le fais ici. C’était là où, pour la première fois, nous avons constaté ce que tout le monde dira plus tard – que nous étions sur la même longueur d’onde, que nous faisions partie de la même histoire, ce qui, à l’époque, était révolutionnaire ”.*

“Nos deux voies sont parallèles; Je travaillais sans savoir ce qu’il faisait et, à son tour, il ne savait pas ce que Kopac faisait à Florence ”.*

1948, 70 x 50 cm; oil on panel
Chasse au sanglier, 1948

“Ce qui nous a réuni, c’était la même vision de la peinture. Nous travaillions ensemble dans son, je souligne, son Art Brut. J’avais plutôt les mains libres pour décider ce que serait admis et ce qu’on devrait refuser, mais l’Art Brut n’était pas à moi et, d’ailleurs, je ne l’ai jamais prétendu. Dubuffet, était-il désagréable? Parfois, il imposait ses choix. Il m’a obligé à prendre la nationalité française. Il m’a dit: J’aimerais que tu prennes en charge la fondation. Pour faire cela, il faut que tu aies la nationalité française ”.*

“Pour moi, Paris était la ville de mes rêves. Je me disais: s’il n’y a pas d’autre façon de le faire, je marcherai jusqu’à Paris; j’étais si attiré par cette ville. Quand j’y suis enfin arrivé, c’était le 30 novembre 1939 ”.*

“Si j’ai fait quelque chose dans ma vie qui en a vraiment valu la peine, c’est certainement ma contribution à l’Art Brut. Pour moi, ca a été plus important que tout ce que j’ai créé sur mes toiles. Pendant vingt ans, il n’y avait qu’une ligne de métro pour moi – de chez moi à l’Art Brut et de l’Art Brut à la maison. Les samedi et dimanche, je peignais des choses bêtes à moi, tout comme un peintre du dimanche. J’avais la chance de pouvoir, comme un kangourou, porter mes peintures – enfants avec moi, de Zagreb en Italie, de l’Italie en France ”.*

1949, 56 x 76 cm; oil on canvas
La Mère 1949

“Je vivais à Paris. Je suis venu en France je pense le 8 août 1948 et, quatre jours après, j’ai rencontré Jean Dubuffet. C’était une grande rencontre, car ce que j’ai montré à lui et ce qu’il m’a montré, ce que nous pouvions nous dire, parce que je toujours mélangeais le français et l’italien, tout ça nous a fait constater que, bien que nous étions éloignés l’un de l’autre, nous empruntions la même voie, c’est-à-dire, nous cherchions les mêmes voies. Et puis, il m’a engagé. A cette époque-là, l’idée a été née d’établir l’Art Brut et j’étais engagé de s’en occuper. Et j’ai fini par être curateur de cette galerie, cette collection pendant 35 ans et j’avais passé toutes les phases de cet organisme qui a maintenant fini en Suisse ”.***

Rencontre, 1961

“Ça a été une grande rencontre. On a trouvé tous ce qu’on a peut-être secrètement avoué à soi-même. Cette purification à moi, s’il l’on peut appeler comme ça, avait commencé en Italie. Pendant la guerre j’étais là, il y avait ce groupe de gens, artistes, peintres, des gens intelligents qui ont étudié de grandes et hautes sciences et c’était un noyau de ces grandes réflexions et discussions. A l’ombre de ce Batister, devant la cathédrale, on se rendait chaque jour et c’étaient des heures de conversation. Ça a commencé là, c’était là où ma seconde libération est arrivée. La première a eu lieu lorsque je suis arrivé à Paris, avec la bourse de la part du Gouvernement français et quand Paris était dans l’obscurité, tous les musées fermés et tout ce qui me restait était la promenade en regardant ces cheminées  parisiennes et ce ciel bleu parisien qui était encore très beau. Et c’était là où j’avais commencé à me libérer, quand j’y suis arrivé, j’ai oublié et essayé de voir le monde avec d’autres yeux et sous une autre lumière par rapport à comment nous le regardions à Paris. Et quand je suis venu à Paris pour la première fois, c’était en 1939, mon seul souhait était de voir les choses différemment que les gens à Paris les voyaient. Pour nous tous Paris était un endroit où on devait aller. Vivre sans Paris, ne pas connaître Paris, c’était le signe qu’on ne réussira pas dans sa vie ou qu’on réussira, mais je ne sais pas à quel prix et avec quelle énergie. Et c’était là-bas où tout a commencé ”.***

Les cerf à la source, 1947/48

“Je pense que ce qui est le plus important c’est de tourner son regard vers son intérieur, de créer et trouver ce cocon, ce trou et vivre avec la petite lumière que votre petite ampoule peut vous donner ”.***

“Je me sens pas seulement libéré, mais libre aussi. Je vous ai déjà dit que la liberté se toujours paie cher. Et je vous dis que j’ai payé cher, mais, j’en suis très content et je n’ai besoin de rien ”.***

Tango, 1988

“C’était aussi bizarre que cette occasion de ma rencontre avec Dubuffet, 8 jours après mon arrivée, je suis entré dans l’Art Brut et j’ai commencé à gérer cette, à l’époque, petite collection, j’ai commencé à m’en occuper. En ce temps-là, Dubuffet est parti à El Golea, pour y peindre et pour regarder ce monde arabe. Pendant ce temps, Breton, qui a été sur le premier comité, le conseil pour l’Art Brut, qui collaborait ensemble avec Paulhan et avec  d’autres, remplaçait Dubuffet et venait chaque jour, dans l’après-midi, à ces locaux et nous regardions ensemble ce qu’il fallait faire, à quoi il fallait répondre et, au bout d’un mois, tout ça a commencé. A cette époque, Breton ne me connaissait point, dans quelle mesure je suis peintre, je ne sais pas, j’étais peut-être toujours de nouveau sauvé par ainsi-nommé charme, tout le monde l’a déjà constaté et, probablement, mon comportement entier, car je suis un homme sans, ils diraient à Vinkovci, sans tendance à faire beaucoup d’embarras, ce que veut dire direct, de manière que tout ça c’est ouvert pour moi et j’ai eu ma première exposition en 1949 et c’était un grand événement. C’était là qu’avec Breton, j’ai fait cette plaque qui lui était l’une des plus chères qui a été jamais publiée. Et il y écrivait, j’ai fait un croquis comment ça organiser et on a fait tout ça ensemble et signé ensemble et, pour moi, c’est un point lumineux. Je parle de l’homme qui m’était exceptionnellement cher, l’un des rares gentleman que j’ai rencontré dans ma vie. Puis, autour de lui, il se trouvaient immédiatement Jean Paulhan et Benjamin Péret, qui m’a écrit la préface pour ma première exposition. Je rencontrais Michaux tous les dimanches au moins une fois le soir et avec Dubuffet. Je suis entré dans ce monde qui était vraiment fermé pour tous. Pourquoi? Je dis toujours comment ce petit garçon de la poussière de Vinkovci a pu se rendre à Paris et comment il est entré dans ce qui était fermé pour tous. Devant la porte de Breton, il y avait un papier, ni journalistes ni reporters, personne ne pouvait sonner à la porte, parce qu’il l’avait défendu. Je le rencontrais et, ce qui est sympathique, ils ne jamais pensaient ni voulaient trouver en moi un peintre surréaliste, ils ont accepté ce qui j’ai leur apporté ”.***

*Mirko Galić; Deuxième lecture – Causeries, Matica Hrvatska, Zagreb 2007

**Antun Babić – La vie et l’oeuvre de Slavko Kopac, imprimée par Zebra, Vinkovci, 2005

***Entretien du 8 août 1984 pour l’émission de radio Meetings and Connaissances

“Il m’est impossible de travailler, d’être heureux, autrement que complètement libre, sans être   lié exclusivément à une personne, à un établissement, à un commerce qui fermerait la porte de mon atelier au hasard d’une rencontre, d’un regard inattendu et nouveau. L’emprunte, la trace de ces rencontres, je les trouve en effet, continuellement présentes dans mes œuvres. Elles me procurent une émotion et un étonnement constant. Mon travail n’est que l’expression d’un besoin de liberté continuellement recherché ”.*

1962, 100 x 81 cm; mixed media (collage, tire, oil painting, impasto) on panel
Arbre fleuri, 1962

“Ce qui m’intéresse, c’est ce que je vois, mais pas ce que j’expérimente. Depuis l’invention de l’appareil photo, la peinture a dû emprunter une autre voie. L’arbre du dieu ne m’intéresse pas; je pense à l’arbre que je vais construire moi-même. Il est différent, peut-être moins beau, mais, c’est mon arbre à moi. Là, voyez-vous cette peinture (pointant du doigt sa toile de 1975): un arbre, complètement différent de ce qu’on peut voir dans la nature ou sur une photo. Ne pensez pas maintenant que je ne pouvais pas peindre un arbre comme il l’est dans la nature! Mais, je ne fais pas ça, car pour moi, c’est l’expérience que j’ai de cet arbre qui est important, mais pas l’arbre lui-même. Un peintre exprime ses sentiments: il ne fait pas des descriptions et il ne raconte pas. C’est une perte de temps ”.*

“J’estime que j’avais à peine 15 ans quand je me suis procuré un livre qui m’a déterminé considérablement: c’était un livre sur le grand peintre autrichien, Schiele. Pour moi, il reste aussi intéressant et ingénieux aujourd’hui qu’il ne l’était à l’époque quand je l’ai découvert. Mais, je n’ai jamais copié, même pas lui ni ou quelqu’un d’autre ”.*

Profil, 1962

“Avant d’arriver à Paris pour m’y installer, je vivais en Italie depuis cinq ans, pour la plupart du temps à Florence. Nos gens venaient, je les accompagnais autour des musées. Le grand Musée d’art étrusque était fermé à l’époque. Mais, j’ai joué un tour et trouvé un homme qui me l’a ouvert. Quand j’ai vu tout ça, je me suis dit que je ne regarderais plus rien. Depuis lors, j’évite les musées, les galeries, les expositions. Cela peut sembler prétentieux, mais je ferme mes yeux pour rester aussi propre que possible. Tout se passe ici (pointant du doigt son cœur), pas ici (pointant du doigt son œil) ”.*

“Je n’aime pas être comparé à quelqu’un, même pas à Dubuffet, à qui je suis le plus attaché. Nous sommes deux hommes qui aiment la même chose. Je ne sais pas si c’était un heureux concours de circonstances ou pas, mais, on s’est rencontrés sur la même voie. Ce qu’on a créé était similaire. J’étais dans une position désavantageuse, comme Dubuffet a commencé à gouverner le monde. Que pouvais-je faire, un homme des banlieues de l’Europe ? De m’en aller ou bien de m’incliner devant lui. Bon ben, je ne suis pas parti, mais je ne me suis pas incliné devant lui non plus. Pourquoi ferais-je cela ? Moi ? Ma célèbre vache a été créée avant les vaches de Dubuffet ”.*

1963, 53 x 71,5 cm; mixed media on canvas
Trois têtes, 1963

“Il n’ya rien de pire que de vivre comme un professionnel. Imaginez seulement un poète qui écrit des poèmes tout en pensant s’ils plairont à l’éditeur et s’il sera payé, probablement, et combien. C’est un affreux destin qui, comme peintre, j’essaye d’éviter. Il n’ya rien de pire que de tenir mon pinceau et penser si quelqu’un achètera ma peinture. Qu’est ce que je ressens alors ? Des soucis, pas de la joie. C’est là où la peinture s’arrête et le commerce commence. Pendant que je peins, je m’amuse et je suis heureux; je me fais une fête. Et tout le reste ne sont que des affaires corrompues, des trahisons et de la prostitution. Il n’y a pas de différence: c’est comme un femme qui met du maquillage pour sortir dans la rue ou en boîte de nuit pour trouver un client. La même chose serait faite par un “professionnel” si la chose la plus importante pour lui devient de vendre sa peinture, de se plaire ”.*

“Pour moi   l’expérience est un bref moment. Quand je dis court, cela peut être un après-midi, deux heures, une demie heure. Et si, dans le délai initialement prévu, je ne fais pas ce que je voulais ou ce que je veux, je l’interromps, je l’abandonne. Pour moi, c’est d’abord et avant tout un jeu. Je ne pense pas aux yeux du celui qui le verra un jour. Ça, c’est mon problème à moi, c’est mon histoire, c’est ma façon de vivre et de construire ma vie, de lui trouver le sens et de lui donner un sens ”.***

Trois ruches, 1991

“Je me sens comme un grand pêcheur, parce que lorsque vous m’écoutez, vous pouvez dire, et je me le dis aussi, comment cet homme qui parle contre cet art professionnel, comment ose-t-il et comment peut-il accepter d’exposer? Car c’est une contradiction. Quand j’étais à l’Art Brut, j’exposais rarement exactement parce que je pensais que je devais vivre conformément à ce que je défends. J’étais contre les musées, contre les galeries, contre tout ce qui est associé à ces activités-là. Mais dans le passé, je sortais de temps en temps afin de voir où je me trouve. Et d’habitude, c’était le moment que je considérais comme nécessaire et qui, même aujourd’hui, me semble être nécessaire, mais qui me poussait de retourner dans mon trou dès que possible et aussi vite que possible. Et aujourd’hui, je pense que j’ai atteint cet âge auquel je n’éprouve aucun désir, aucun besoin dans le sens du luxe, des appareils chers ou d’autres. Je ne peux plus être tenté de permettre à n’importe qui de me décevoir ”.***

*Mirko Galić; Deuxième lecture – Causeries, Matica Hrvatska, Zagreb 2007

**Antun Babić – La vie et l’oeuvre de Slavko Kopac, imprimée par Zebra, Vinkovci, 2005

***Entretien du 8 août 1984 pour l’émission de radio Meetings and Connaissances